DESIGNER UN REPRÉSENTANT DE LA SECTION SYNDICALE (RSS)
Institution du personnel encore récente, le représentant de la section syndicale peut être désigné par un syndicat qui n’est pas représentatif. Mission : animer la vie syndicale et amener l’organisation à la représentativité. Pour l’heure, le contentieux tourne essentiellement autour de la désignation des RSS Le RSS anime l’activité syndicale dans l’entreprise, notamment dans la perspective des élections professionnelles
Conditions de désignation
La désignation d’un représentant de la section syndicale (RSS) est réservée au syndicat non représentatif dès lors que ce dernier a constitué une section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement. Les conditions liées à l’implantation d’une section syndicale doivent donc être réunies. Cela suppose que le syndicat soit affilié à une organisation nationale interprofessionnelle représentative ou qu’il réponde aux critères suivants : respect des valeurs républicaines et indépendance, ancienneté de deux ans, champ géographique et professionnel couvrant l’entreprise (Art. L. 2142-1 du Code du travail). Le syndicat doit compter au moins deux adhérents, dont le RSS lui-même (Cass. soc. 26 mai 2010, n° 09-60278).
Il est nécessaire en outre que l’effectif de l’entreprise ou de l’établissement atteigne au moins 50 salariés (Art. L. 2142-1-1 du Code du travail). Le fait qu’un accord collectif établisse une dérogation à la condition d’effectif pour la désignation de délégués syndicaux n’ouvre aucune possibilité pour la désignation d’un RSS : ces dispositions conventionnelles ne lui sont pas applicables (Cass. soc. 26 mai 2010, n° 09-60243). Seul un accord collectif portant spécifiquement sur le RSS peut abaisser le seuil d’effectif. En revanche, lorsqu’il y a entre 11 et 49 salariés, un délégué du personnel peut être désigné pour la durée de son mandat comme RSS (Art. L. 2142-1-4 du Code du travail). Il ne peut s’agir que d’un délégué du personnel titulaire, disposant ainsi d’heures de délégation (Cass. soc. 27 mars 2013, n° 12-20369).
Enfin, quel que soit le nombre de salariés, un seul RSS peut être désigné pour une même section (Cass. soc. 14 déc. 2010, n° 10-60263). Sachant que, si l’entreprise est composée de plusieurs établissements distincts, tout établissement dans lequel est implantée une section peut avoir un RSS, si le syndicat choisit d’asseoir sa représentation à ce niveau.
Entreprises à structure complexe
La Cour de cassation a souligné que c’est l’existence de la section syndicale qui permet la désignation d’un RSS, si le syndicat n’est pas représentatif, ou d’un délégué syndical, si le syndicat est représentatif. Il en résulte que le cadre de la désignation de ces représentants est nécessairement le même (Cass. soc. 14 déc. 2010, n° 10-60221). Si un accord collectif fixe le cadre de désignation des délégués syndicaux d’établissements, les organisations syndicales doivent désigner leur RSS dans ce même cadre (Cass. soc. 9 nov. 2011, n° 10-60402. En espèce, un accord collectif avait mis en place deux comités d’établissement dont l’un regroupait les agences et le siège social. Les syndicats représentatifs avaient la possibilité d’y désigner sept délégués. Les syndicats non représentatifs bénéficiaient de la même faculté, à condition d’opérer dans les cadres définis conventionnellement).
Il peut arriver qu’un syndicat soit représentatif au niveau de l’entreprise, sans l’être dans tous les établissements composant l’entreprise. Dans ce cas de figure, les juges admettent désormais que ledit syndicat puisse désigner un délégué syndical central au niveau de l’entreprise et un RSS dans les établissements où il n’a pas acquis la représentativité (Cass. soc. 13 fév. 2013, n° 12-19662, Dr. ouv. 2013-558, note P. Rennes).
Lorsque le syndicat désignataire n’est pas représentatif dans l’entreprise, il doit choisir le niveau de désignation du RSS : soit l’entreprise, soit l’établissement. Il ne peut pas cumuler les deux niveaux (Cass. soc. 20 juin 2012, n° 11-60202 : s’il n’a pas encore désigné de RSS dans le cadre des établissements distincts, le syndicat peut désigner un seul RSS pour toute l’entreprise). Il n’existe en effet pas d’équivalent au délégué central pour les représentants de la section syndicale (Cass. soc. 29 oct. 2010, n° 09-60484. Dans une entreprise composée de 8 établissements distincts, un syndicat, représentatif dans 3 de ces 8 unités, avait désigné un RSS au niveau de l’entreprise. Cela lui interdisait de mandater en plus des RSS au niveau des établissements distincts).
Qui peut être RSS ?
Comme le délégué syndical, le représentant de la section syndicale doit être âgé de 18 ans minimum, travailler dans l’entreprise depuis au moins un an, et n’avoir fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à ses droits civiques (Art. L. 2142-1-2 et L. 2143-1 du Code du travail). Dans les entreprises de travail temporaire, l’intéressé ne doit justifier que de six mois d’ancienneté, en cumulant toutes les périodes travaillées sur les dix-huit derniers mois. Dans les entreprises nouvellement créées, quatre mois d’ancienneté suffisent (Art. L. 2143-1 et L. 2143-2 du Code du travail).
Le RSS peut être délégué du personnel, membre du comité d’entreprise ou, dans les entreprises de plus de 300 salariés, représentant syndical au comité d’entreprise, car ces mandats sont cumulables. Le délégué syndical d’une organisation qui a perdu sa représentativité au dernier scrutin professionnel peut se voir attribuer, à la suite de ces élections, le mandat de RSS (voir ci-dessous).
Mission et moyens
Le représentant de la section syndicale anime l’activité syndicale dans l’entreprise, notamment dans la perspective des prochaines élections professionnelles. Ses fonctions sont communes à celles d’un délégué, hormis le fait qu’il ne peut pas négocier les accords collectifs. En effet, le RSS n’accède à la table des négociations que lorsque les autres alternatives – y compris dérogatoires – sont épuisées. Il peut négocier dans les entreprises de plus de 200 salariés dépourvues de délégués syndicaux lorsqu’il n’est pas possible de négocier avec des élus ou des salariés mandatés, et lorsque le syndicat dont il émane est affilié à une organisation représentative au niveau national et interprofessionnel. L’accord collectif qu’il signe doit être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés (Art. L. 2143-23 et L. 2232-14 du Code du travail).
Le RSS représente le syndicat dans l’entreprise. Il est amené, à ce titre, à formuler des propositions et des revendications, peut se déplacer hors de l’entreprise pendant ses heures de délégation et circuler dans l’entreprise pendant ses heures de délégation ou en dehors de ses horaires habituels de travail pour y prendre tous les contacts nécessaires, sous réserve de ne pas gêner de manière importante le travail des salariés (Art. L. 2143-20 du Code du travail). Il a par ailleurs le droit de collecter les cotisations syndicales, utiliser les panneaux d’affichage, distribuer des tracts, participer et animer les réunions mensuelles du syndicat.
Contrairement au délégué syndical, le RSS n’est pas de droit représentant syndical au comité d’entreprise (CE) dans les entreprises de moins de 300 salariés (Cass. soc. 14 déc. 2011, n° 11-14642). La loi ne permet en effet qu’aux organisations représentatives d’avoir un représentant dans les entreprises de cette taille. Le RSS peut en revanche siéger au CE dans les entreprises d’au moins 300 salariés si le syndicat dont il est issu remplit la seule condition posée par l’article L. 2324-2 du Code du travail : avoir deux élus au CE.
Le RSS dispose de quatre heures de délégation par mois. C’est un minimum légal. Le Code du travail précisant que le RSS doit bénéficier « du temps nécessaire à l’exercice de ses fonctions », il est conseillé de négocier l’octroi d’un crédit d’heures plus important. Ces heures sont de plein droit considérées comme heures de travail et payées à échéance normale. S’il souhaite en contester l’utilisation, l’employeur doit saisir les prud’hommes (Art. L. 2142-1-3 du Code du travail).
À l’égal des délégués syndicaux, le RSS est protégé contre le licenciement : celui-ci ne peut intervenir qu’avec l’autorisation de l’inspecteur du travail. Cette protection court encore pendant douze mois après la cessation de son mandat, s’il a exercé celui-ci pendant un an (Art. L. 2142-1-2 du Code du travail renvoyant aux dispositions applicables en la matière aux délégués syndicaux).
Fin de mandat
À la fin des quatre années pour lesquelles il a été mandaté, de nouvelles élections ont lieu et le mandat du RSS prend fin quoi qu’il arrive. En effet, soit le syndicat obtient un score supérieur à 10 %, auquel cas il est représentatif et peut se pourvoir d’un délégué ; soit il ne franchit pas le seuil et n’est pas reconnu représentatif, auquel cas la loi interdit au RSS « sortant » d’être désigné au même mandat pendant une période allant jusqu’aux 6 mois précédant la date des élections suivantes dans l’entreprise (Art. L. 2142-1-1 du Code du travail). Le syndicat doit se tourner vers un autre militant.
Toutefois, l’impossibilité pour le RSS d’exercer deux mandats consécutifs ne s’applique pas dans un contexte de restructuration modifiant le cadre d’organisation des élections. Suite à la fusion absorption dont avaient été l’objet plusieurs entreprises, de nouvelles élections avaient été organisées. Le RSS désigné dans une des entreprises d’origine a pu se succéder à lui-même car le périmètre dans lequel les élections étaient organisées n’était plus le même (Cass. soc. 25 sept. 2013, n° 12-26612).
L’article L. 2142-1-1 du Code du travail n’interdit pas au syndicat de désigner en qualité de RSS un salarié qui exerçait, avant les élections ayant entraîné la perte de la représentativité de son organisation, les fonctions de délégué syndical (Cass. soc. 20 mars 2013, n° 11-26836. C’est à tort que l’employeur tentait d’interdire à la CFTC, qui avait perdu sa représentativité, de désigner son ancien délégué en tant que RSS en arguant du fait que l’interdiction posée par l’article L. 2142-1-1 visait « de façon générique tous les mandats de représentation délivrés par le syndicat avant les élections »). De la même façon, peut être désigné RSS le représentant au CE du syndicat dont le mandat a pris fin suite à la perte de représentativité dudit syndicat (Cass. soc. 4 nov. 2009, n° 09-60039).
Zoom
Formalités
C’est l’organe interne du syndicat – par exemple le secrétaire général – habilité à désigner les représentants syndicaux, qui peut désigner le RSS, sauf stipulations statutaires contraires (Cass. soc. 18 nov. 2009, n° 09-65639). Une union syndicale peut désigner un RSS en se substituant au syndicat implanté dans l’entreprise à condition que l’adhésion dudit syndicat à l’union soit effective, c’est-à-dire qu’elle ait été validée conformément aux statuts (Cass. soc. 5 déc. 2012, n° 12-14366). La désignation peut aussi être opérée par une union (UL, UD, fédération…) lorsque n’est présente dans l’entreprise que la section syndicale.
Le nom du RSS est porté à la connaissance de l’employeur par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. À peine de nullité, la lettre doit préciser le cadre de la désignation et la fonction exacte de l’intéressé. Copie de la lettre est adressée à l’inspection du travail. Le nom du mandaté doit aussi être affiché dans l’entreprise sur les panneaux syndicaux.
Le délai de contestation, imparti à l’employeur comme aux salariés et syndicats, est de quinze jours. Si c’est l’employeur qui introduit une action au tribunal d’instance, le délai court à compter de la réception de la lettre. S’agissant des autres demandeurs potentiels, il court à compter de l’affichage dans l’entreprise. Une fois le délai écoulé, la désignation est purgée de tout vice (art. L. 2142-1-2 du Code du travail renvoyant aux articles L. 2143-7 et suiv.). À noter qu’en cas de désignation frauduleuse, le point de départ du délai de forclusion est reporté au jour où l’employeur a eu connaissance de la fraude (Cass. soc. 27 fév. 2013, n° 11-28084).
Source : NVO