Avis CGT - Projet de décret
Avis CGT sur les projets des décrets relatifs
à la composition et au fonctionnement
de la délégation unique du personnel
et à l’instance mentionnée à l’article L2391-1 du code du travail
La CGT émet un avis défavorable sur ces deux projets de décrets.
Elle regrette en particulier que l’opposition et des propositions formulées par des organisations syndicales à certaines dispositions dans la phase des pré-projets n’aient pas été entendues.
Globalement le nombre d’élus diminue ou est appelé à l’être dans l’ensemble des entreprises, en particulier pour les entreprises qui comptent les effectifs les plus nombreux. La CGT est attachée à une représentation du personnel au plus près des salariés en particulier en qui concerne les membres du CHSCT et les DP. Or, celle-ci sera centralisée par conséquent loin de ces derniers. Elle amputera l’échange nécessaire avec les salariés, indispensable et complémentaire aux réunions des instances.
Concernant la nouvelle Délégation unique du Personnel, nous observons que le décret proposé impose un nombre d’élus titulaires et suppléants inférieur à ce que prévoyait l’étude d’impact. La concentration des différentes missions de la DUP (DP, CE, CHSCT) sur un nombre réduit de représentants s’en trouve donc renforcée et accentue les risques de nuisance à la qualité du dialogue social dans l’entreprise.
Nous avons appliqué le projet de décret relatif au regroupement des IRP par accord à une entreprise automobile qui compte 32 676 salariés et 12 établissements distincts. Si l’on s’en tient au projet de décret, dans l’hypothèse où le regroupement se fait au niveau de l’entreprise celle-ci pourrait compter 15 élus titulaires ( !!! ).
Aujourd’hui, elle compte 385 titulaires (hors DS), soit un titulaire pour 84 salariés. Selon le projet de décret elle pourrait compter 155 titulaires soit un titulaire pour 210 salariés.
Il en est de même pour le nombre d’heures de délégation qui sont aujourd’hui de 6 750 par mois, soit 12,39 minutes tous mandats confondus à consacrer par mois et par salarié. Avec le projet de décret le nombre d’heures de délégation possible sera de 2 480 heures soit 4,5 minutes à consacrer par mois et par salarié.
Renvoyer le nombre d’élus et le temps de délégation à la négociation avec des planchers aussi bas, revient à générer d’emblée des moyens à la baisse, l’employeur ne manquant pas de se calquer sur la référence plancher dans le cadre de la négociation.
Les moyens mis à la disposition des IRP doivent être en adéquation avec les besoins des salariés et de leur nombre. Cela ne devrait pas faire l’objet d’un compromis dans le cadre d’une négociation.
Cette atteinte au droit de représentation des salariés est pour le moins paradoxale au regard des proclamations officielles d’attachement au « dialogue social ».
Elle est aussi en contradiction avec l’étude produite par la DARES à partir de l’enquête « Réponse » de 2011 sur les représentants du personnel, qui montre que plus l’établissement est grand, plus les représentants du personnel déclarent consacrer un temps supérieur à leur décharge horaire dispo (c’est le cas dans 64 % des établissements de plus de 500 salariés).
Une régression importante est également prévue dans le projet relatif à la composition et au fonctionnement de la Délégation unique du personnel :
Mise en place du principe d’un délai de prévenance d’un mois en matière de prise d’heures de délégation cumulées ou mutualisées. Certes, cela concernera uniquement ces catégories d’heures, néanmoins le risque de généralisation ne peut pas être écarté. De plus, il sera extrêmement difficile en pratique, pour un élu de prévoir une prise de délégation autant en amont. Par conséquent, cette disposition aboutit, en fait, à empêcher, le représentant du personnel de prendre, ces heures de délégation.
La mise en place de ce délai a été rejetée par la représentation nationale. Il s’agissait alors d’un délai de 8 jours. La CGT est choquée par la méthode qui consiste à prévoir, dans un décret, une disposition rejetée dans le cadre de la loi. Elle s’interroge également sur la légalité d’une telle disposition par voie de décret. Elle manque de base légale à son sens.
Le principe en matière de prise d’heures de délégation doit demeurer celui de l’information de l’employeur afin de lui permettre de décompter le nombre d’heures prises. C’est la réalité actuelle de fonctionnement dans les entreprises qui permet généralement une régulation sans conflit. Instaurer un délai de prévenance, qui plus est d’un mois, risque fort de rigidifier et de créer des contentieux sur une question où le dialogue se déroule de manière satisfaisante.
Enfin, dans ces deux projets la spécificité du rôle du CHSCT semble ignorée. En tout cas, elle est considérable amoindrie en particulier par sa fusion avec les autres instances. Ceci est paradoxal alors que la problématique de la santé et la sécurité au travail des salariés est plus que jamais à l’ordre du jour et rappelé comme une priorité dans le plan Santé Travail.